Bienvenue au Laboratoire Géoazur
Observatoire de la Côte d'Azur
Université Côte d'Azur
UMR 7329 CNRS - UR 082 IRD

NuageDeMots Geoazur 2024

Récupération des sismomètres OBS (Ocean Bottom Seismometer) en Mer des Caraïbes en 2011. Collecting Ocean Bottom Seismometers (OBS), Caribbean Sea, 2011.

Antenne GPS dans le secteur Efstafellsvatn, Islande, 2010. GPS antenna in the Efstafellsvatn area, Iceland, 2010.

Flotteurs MERMAID stockés dans les locaux de Géoazur (France), où le premier prototype est né en 2012. MERMAID floats stored in the Géoazur premises (France), where the first prototype was born in 2012.

Tir laser-Lune depuis la station MéO sur le plateau de Calern, France. Moon-Laser shot from the MéO station on the Calern plateau, France.

Le laboratoire Géoazur est une Unité Mixte de Recherche pluridisciplinaire, composée de géophysiciens, de géologues, et d’astronomes se fédérant autour de grandes problématiques scientifiques : les aléas et risques naturels (séismes, glissements de terrain, tsunamis, crues) et  anthropiques (séismes et vibrations induits par l’homme, pollutions, comportements humains, vulnérabilités des territoires et des structures), la dynamique de la terre et des planètes, les géosciences des environnements marins (de l’innovation numérique et instrumentale aux applications), et la géodésie et métrologie spatiale. en savoir plus

Directeur : Boris MARCAILLOU

111229 logoartDepuis plus d’un siècle l’interprétation mécanique de la formation des fractures naturelles préoccupe les géologues tant du point de vue académique (comment l’écorce terrestre se déforme-t-elle en cassant ?) qu’industriel (réserves de fluides, gîtes minéraux).
Les résultats de recherches interdisciplinaires menées depuis une dizaine d’années dans le cadre du consortium Geo-FracNet et d’une collaboration avec les sociétés Shell et Total sous la direction de Alexandre Chemenda, physicien-géomécanicien de Géoazur (CNRS-Univ Nice Sophia Antipolis) et de Jean-Pierre Petit, géologue de Géosciences Montpellier (CNRS-Univ Montpellier 2), remet en cause les interprétations généralement admises des fractures les plus abondantes de l’écorce superficielle, les diaclases (ou joints tectoniques).

 

Les diaclases s’organisent en réseaux géométriques parfois très spectaculaires. La synthèse d’analyses de terrain détaillées et de travaux expérimentaux récents suggère que ces diaclases ne seraient que l’expression d’une dilatation localisée. Ceci a des conséquences sur la genèse des réservoirs fracturés et plus généralement, sur la compréhension des mécanismes de rupture des géomatériaux. Ces travaux ont fait l’objet de plusieurs publications dans des revues spécialisées dont Tectonophysics.

 111229 fig.1

Fig1-Réseau de diaclases dans un banc de grés (Eaglehawk Neck, Tasmania).

Pourquoi étudier les fractures de l’écorce terrestre ?
L’écorce terrestre superficielle est affectée par des systèmes de fractures de toutes tailles qui font l’objet d’une quantité croissante de travaux auxquels participent en commun chercheurs du monde académique et de l’industrie. La motivation en est la raréfaction des ressources naturelles qui pousse les industriels à étudier le détail de la répartition des fluides économiques dans les réservoirs, tels l’eau, le gaz, le pétrole. Une partie très importante de ces fluides se trouvent dans des fractures affectant les réservoirs. Le transfère des fluides (pendant leur production, par exemple) est également largement contrôlé par les fractures. Pour appréhender ces objets en profondeur les spécialistes se heurtent à plusieurs difficultés. Les méthodes de la sismique pétrolière ne permettent que de voir les grandes structures de taille décamétrique (le plus souvent des failles) tandis que les observations en forage ne montrent que des détails ponctuels. La prédiction des conditions de formation, de la géométrie et des propriétés des fractures en profondeur devient donc cruciale.
L’apport d’une nouvelle approche expérimentale

 111229 fig.2

Fig 2-Réseaux de diaclases (en coupe) et morphologie de leurs surfaces dans la nature et le modèle physique (Jorand et al.).

111229 fig.3

Fig 3-Image au microscope électronique à balayage des bandes de dilatances formées (a) dans la nature pendant un processus géologique (diaclases embryonnaires) et (b) dans un modèle physique (Chemenda et al., 2011a,b).

Après plus d’une centaine d’années de recherches consacrées à ces fractures, leur origine reste toujours mal comprise d’où la difficulté de leur prédiction. Ce sont pourtant les structures naturelles cassantes les plus simples, puisqu’elles résultent d’une séparation non cisaillante de la roche en deux parties. Il était généralement admis dans le cadre de la mécanique de la rupture que des tractions étaient nécessaires pour former les diaclases en déchirant la roche. Les résultats obtenus par A Chemenda et J.P. Petit et leurs collègues dans le cadre de Geo-FracNet remettent en cause cette interprétation

Un point décisif de cette recherche a été la mise au point d’un matériau granulaire, analogue de roche par ses propriétés (friction interne, cohésion et dilatance), plus homogène mais beaucoup moins résistant et rigide que les roches. Ces propriétés font que les échantillons expérimentaux représentent un volume de roche significatif analogue à ce que le géologue observe à l’affleurement.

Une première série d’expériences a consisté à soumettre des éprouvettes cylindriques à une pression isotrope (axiale et latérale identique) qui se rapproche des conditions géologiques profondes, puis à relâcher la pression seulement selon l’axe du cylindre, en lui laissant la possibilité de s’allonger selon cette direction. On constate alors que la décroissance de la compression axiale suffit à faire apparaître des discontinuités, autrement dit le matériau se rompt sans qu’il soit nécessaire d’exercer une traction.

Des essais en extension sur échantillons parallélépipédiques (dits poly-axiaux) ont permis de reconstituer pour la première fois, sans aucun effort en traction, des familles de joints/discontinuités parallèles (Fig 2c). Dans tous les types d'essais, après ouverture, ces discontinuités montrent les mêmes « structures plumeuses », caractéristiques des joints naturels (Figs. 2b,d). Ces figures reflètent certainement les processus physiques intimes conduisant à la rupture du matériau.

L’observation au microscope électronique à balayage, montre qu’à une échelle très fine et avant leur séparation, ces discontinuités apparaissent comme des bandes de porosité plus forte que dans le reste du matériau, c’est-à-dire comme des bandes de dilatance qui se propagent donc sans ouverture.

Vers une meilleure compréhension des processus de rupture

Ces résultats, et d'autres obtenus sur plus de 300 essais, montrent que la rupture des géomatériaux implique un comportement complexe, instable et non intuitif, depuis l'échelle d'une petite fracture jusqu’à celle de la déstabilisation/rupture gravitaire d'un versant ou de l'activité sismique d'une faille. Ils ouvrent les nouvelles pistes pour des développements théoriques et numériques en cours, mais aussi pour des travaux expérimentaux et géologiques. Les résultats montre que les joints peuvent se former à des profondeurs et avec des densités bien plus grandes qu’on ne le pensait. On peut maintenant envisager des modèles prédictifs de fracturation prenant en compte l’histoire tectonique des roches réservoirs qui subissent couramment des déformations en compression et en extension.

Ceci à fait l’objet de discussions lors de deux workshops internationaux réunissant des chercheurs académiques et industriels (EOS, 2011).

Source(s):

Jorand, C., Chemenda, A. I., Petit, J-P., Formation of parallel joint sets and shear band fracture networks in physical models, Tectonophysics, doi: 10.1016/j.tecto.2011.11.021 (sous presse).

Chemenda, A. I., Nguyen, Si-H., Petit J.P., Ambre, J. (2011), Mode I cracking versus dilatancy banding: Experimental constraints on the mechanisms of extension fracturing, J. Geophys. Res., 116, B04401, doi:10.1029/2010JB008104.

Petit J.P., Chemenda, A. I., Experimental, and Numerical Studies of Deformation Localization Bands, EOS, Vol. 92, No. 42, 18, 2011.

Contact(s):

Alexandre Chemenda, Géoazur (CNRS-UNS-IRD/OCA)
chem@geoazur.unice.fr, 04 92 94 26 61

Jean-Pierre Petit, Géosciences Montpellier (CNRS, Montpellier 2)
Jean-Pierre.Petit@gm.univ-montp2.fr

 

Article paru au CNRS INSU le 29 décembre 2011

 

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